phenotypes des filles d'ETSAR
Syndrome CHARGE

Syndrome CHARGE en race Montbéliarde

Le bovin comme animal modèle pour le syndrome CHARGE humain : En race montbéliarde, un taureau porteur d’une anomalie dominante dont les symptômes sont passés inaperçus donne naissance à plus de 1000 descendants.

Les premiers cas remontent à l’ONAB en 2013.D’autres s’en suivent rapidement et il apparait que tous les animaux sont issus d’un même père. L’hypothèse d’un déterminisme génétique dominant est posé.

Pauline Otz, de VetAgroSup prend en charge l’étude du phénotype sur le terrain. Les symptômes sont multiples et l’expressivité variable : les animaux présentent des troubles de l’équilibre dans leurs premiers jours de vie (difficulté au lever, tête rejetée en arrière,…) ; leur croissance est ralentie et ils souffrent fréquemment de fentes palatine ou labiale et de malformations cardiaque.

La collecte d’échantillons permet rapidement d’établir une cartographie sur le chromosome 14 bovin. Puis la séquence complète du génome d’une fille atteinte du taureau nous permet de trouver une mutation dans CHD7, un gène candidat fonctionnel de la région.

En effet, chez l’homme, des mutations dans ce gène provoquent des symptômes similaires :

La protéine CHD7 est un remodeleur de la chromatine qui joue un rôle crucial dans la régulation de l’expression des gènes impliqués dans le développement de la crête neurale. La perte de fonction de ce gène chez l’homme cause une combinaison variable de malformations appelée syndrome CHARGE (C pour colobome, H pour heart : malformations du cœur, A pour atrésie choanale : les fentes nasales peuvent être bouchées, R pour retard de croissance, G pour défauts de l’appareil génito-urinaire, et E pour ear : troubles de l’oreille). Ce type de syndrome sporadique est très difficile à étudier, du fait du faible nombre de patients ayant de surcroit des symptômes variables. Au contraire, la très grande cohorte bovine permet de décrire tous les phénotypes, avec un nombre d’observations statistiquement utilisables.

Nous avons trouvé d’autres symptômes non décrits précédemment : une augmentation légère de la mortalité, une réduction du volume de l’éjaculat des mâles mais pas de sa concentration ni de sa qualité ; pas d’effet sur la durée de gestation. En revanche la production laitière des femelles est nettement diminuée.

De plus, parmi les filles porteuses de la mutation, certaines étaient très affectées, tandis que d’autres ne le semblaient pas, ce qui suggérait la présence de loci modificateurs. Nous avons alors cartographié les zones du génome (et donc les gènes) qui pourraient être des améliorateurs ou des aggravateurs des effets de la mutation dans CHD7.

Cette recherche inédite de facteurs influençant l’expression du syndrome a été conduite en opposant les génotypes des descendantes affectées contre les non-affectées. Nous avons ainsi mis en évidence plusieurs zones, qui comportent des gènes. En les étudiant, nous avons trouvé plusieurs gènes qui lorsqu’ils sont mutés chez la souris provoquent des symptômes faisant partie du tableau clinique du syndrome CHARGE.

Cette étude nous apporte une meilleure compréhension des bases moléculaires d’un syndrome à expression variable.

Gestion de l’anomalie : Toutes les filles en vie du taureau impliqué ont été génotypées, afin de contrôler la diffusion de l’anomalie. Toutes les femelles porteuses ont été réformées.

Bibliographie

Bourneuf et al., 2016. Rapid Discovery of De Novo Deleterious Mutations in Cattle Using Genome Sequence Data: Enhancing the Value of Farm Animals as Model Species. Scientific Reports, 7: 11466.

http://dx.doi.org/10.1038/s41598-017-11523-3