Epidermolyse

Epidermolyses bulleuses (EB)

Observée sporadiquement depuis le début des années 1980, l’EB se caractérise par le détachement de l’épiderme du derme de la peau. En 2023, l'ONAB a publié l'identification d'une seconde épidermolyse bulleuse récessive en race charolaise.

Les veaux atteints présentent dès la naissance de larges plages de peau à vif, le plus souvent aux extrémités (pieds, pattes, museau, oreilles). Le léchage par la mère aggrave fréquemment cette condition. Les veaux sont systématiquement euthanasiés pour leur éviter de souffrir inutilement. Dans le cas contraire, ils mourraient d’infections multiples.

Cette anomalie récessive touche en effet la jonction dermo-épidermique. De rares cas ont été reportés pour être en association avec des mutations dans les gènes codant pour des composants du complexe d'ancrage de l'épiderme sur le derme, protéines essentielles au maintien de l’intégrité structurale de la peau (ITGA6, ITGB4, COL17A1, LAMA3, LAMB3, LAMC2) chez l'homme et d'autres espèces.

Des travaux de recherche ont été initiés pour cette anomalie et malgré le nombre insuffisant d’échantillons à la disposition des chercheurs une mutation a été identifiée :

L’ADN d’un seul cas étant disponible au moment de l’étude, la recherche de régions homozygotes a été effectuée directement à partir des données de séquençage du génome: 54 régions homozygotes de taille supérieure à une mégabase ont été identifiées. Les variants présents dans ces régions ont ensuite été filtrés à l’aide des données de séquence de 8 Charolais sains et de 234 individus d’autres races.

Aucun SNP ou petites Insertion/Délétion candidats n’ayant été identifiés, nous avons procédé à une recherche de variants structuraux. Ainsi, nous avons mis en évidence une grande délétion affectant les exons 17 à 23 du gène codant pour l’intégrine beta 4 (ITGB4), dont la perte de fonction entraîne un syndrome similaire chez l’homme et de nombreuses espèces. Le génotypage des parents et d’un autre cas né au cours de l’étude a permis de confirmer la parfaite association entre cette mutation candidate et les génotypes attendus.

Seconde anomalie identifiée

Trois animaux sont nés, dans deux troupeaux, portant des symptômes un peu plus légers que pour la première épidermolyse décrite à l'ONAB. Les pedigrees montraient une certaine consanguinité dans un élevage, et aucune information dans le second.

La cartographie suivie de l'analyse des séquences du génome entier de deux cas, comparés à plus de 5000 individus témoins, nous a permis de trouver une mutation dans un site donneur d'épissage du gène ITGA6 (c.2160 + 1G > T ; Chr2 g.24112740C > A), qui est prédite pour provoquer des transcrits mutants, support de l'expression du gène). Cette substitution n'a été identifiée qu'en race Charolaise dans nos données, et à très faible fréquence (1,6 animal sur 10.000).

Les analyses de RT-PCR (permettant de regarder les transcits du gène) ont révélé que deux introns du gène ITGA6 (14 et 15)  étaient moins représentés chez la vache mutante hétérozygote par rapport aux valeurs exprimées chez un témoin sain.

Autrement dit, la lecture du code génétique des transcrits (ARNm) affecte bien la protéine, par un décalage du cadre de lecture. La protéine mutante, déstabilise l'assemblage du dimère d'intégrines α6β4, or ce dimère assure la fixation des cellules épithéliales basales à la membrane basale. La mutation perturbe l'ancrage correct du dimère à la membrane cellulaire.

Sur la base de ces éléments, nous avons posé un diagnostic d'EB jonctionnelle, ce qui constitue la première preuve d'une mutation dans ITGA6 responsable d'EB chez une espèce d'élevage.

Enfin, voici à nouveau un exemple qui montre que si une anomalie est décrite et identifiée dans une race, elle peut cacher une anomalie similaire dans la même race... Alors n'oubliez pas déclarer TOUT ce que vous voyez, nous ferons le reste.

Merci :)

Voir aussi

Whole-genome sequencing identifies a homozygous deletion encompassing exons 17 to 23 of the integrin beta 4 gene in a Charolais calf with junctional epidermolysis bullosa.

Michot P1,2, Fantini O3, Braque R4, Allais-Bonnet A5,6, Saintilan R7,8, Grohs C9, Barbieri J10, Genestout L11, Danchin-Burge C12, Gourreau JM13, Boichard D14, Pin D15, Capitan A16,17.Genet Sel Evol. 2015 May 3;47:37. doi: 10.1186/s12711-015-0110-z.

Integrin alpha 6 homozygous splice-site mutation causes a new form of junctional epidermolysis bullosa in Charolais cattle

Mekki Boussaha,1 Arnaud Boulling,1 Valérie Wolgust,2 Lorraine Bourgeois-Brunel,1 Pauline Michot,1,3,7 Cécile Grohs,1 Nicolas Gaiani,1 Pierre-Yves Grivaud,4 Hélène Leclerc,1,3 Coralie Danchin-Burge,5 Marthe Vilotte,1 Julie Rivière,1,6 Didier Boichard,1 Jean-Marie Gourreau,2 and Aurélien Capitan1,3 

Genet Sel Evol. 2023; 55: 40.Published online 2023 Jun 12. doi: 10.1186/s12711-023-00814-1

Date de modification : 30 novembre 2023 | Date de création : 21 février 2014 | Rédaction : ONAB